Le marché du Trésor américain est soumis à des pressions depuis que les annonces de tarifs douaniers colossaux du président Donald Trump ont déclenché un mouvement de vente généralisé dans les obligations. Face à la rapidité avec laquelle sont prises et annulées des décisions politiques ayant de profondes implications financières, il est compréhensible que les détenteurs d’actifs américains éprouvent un sentiment de malaise.
Deux facteurs influencent le marché du Trésor américain : le volume important des investissements réalisés par les fonds spéculatifs et d’autres investisseurs dans des transactions à fort effet de levier, ainsi que le retrait potentiel des investisseurs étrangers qui cherchent à diversifier leurs actifs en dehors des États-Unis. Certains investisseurs craignent que cette instabilité ne soit sur le point de provoquer un événement de liquidité; c’est-à-dire une situation où les titres du Trésor ne peuvent pas être aisément achetés ou vendus sans entraîner des variations de prix importantes. Si le marché atteignait un point de rupture, comme lors de la pandémie de COVID-19, nous pensons que la Réserve fédérale américaine réagirait rapidement, mais probablement pas par des baisses de taux, compte tenu de l’incertitude entourant l’inflation future.
La liquidité s’est resserrée et l’incertitude reste élevée, notamment en raison de la capacité de certains gros titres à provoquer une forte réévaluation des prix. Mais jusqu’à présent, les marchés obligataires ont pour la plupart continué à fonctionner de manière ordonnée.
La stabilité du marché s’est améliorée après l’annonce, le 9 avril, d’une pause de 90 jours sur les tarifs douaniers réciproques. Par ailleurs, le gouvernement américain a pu adjuger, le 9 avril, 39 G$ US d’obligations du Trésor à 10 ans et, le 10 avril, 13 G$ US d’obligations du Trésor à 30 ans, avec de bons résultats. Cependant, une certaine incertitude persiste sur le marché. Les rendements des titres du Trésor à 10 ans ont grimpé pour s’établir autour de 4,4 %.
Répartition au sein du marché du Trésor américain
Source : Trésor américain. Données au 28 février 2025.
Les ventes de titres du Trésor par des investisseurs étrangers ont suscité beaucoup d’attention. Les données sont limitées sur les marchés des taux, mais à ce jour, nous n’avons pas observé de désengagement généralisé de la part des investisseurs non américains. Toutefois, certains signaux indiquent que les acheteurs internationaux pourraient se détourner des adjudications du Trésor dans l’optique de diversifier leurs réserves dans d’autres monnaies. Dans le même temps, nous assistons à une hausse des rendements à long terme et à un affaiblissement du dollar américain.
Si les investisseurs mondiaux commencent à se détourner du marché du Trésor américain, cela créerait une situation préoccupante, car elle priverait ce marché d’un segment important d’acheteurs et pourrait accentuer la pression sur les taux. Mais lorsque l’on parle d’un acteur individuel qui se débarrasse de ses actifs, il est important de souligner que les détenteurs de titres du Trésor sont aujourd’hui beaucoup plus dispersés qu’ils ne l’étaient il y a dix ans.
La détention de titres du Trésor américain s’est diversifiée
Source : Trésor américain. Données au 28 février 2025.
Source : Trésor américain. Données au 28 février 2025.
Les problèmes potentiels liés aux fonds spéculatifs sont nombreux et importants. Bon nombre d’acteurs du marché ont mis en lumière les fameuses « transactions de base », dans lesquelles les investisseurs achètent un titre du Trésor et vendent simultanément un contrat à terme sur ce même titre. Ces transactions impliquent généralement un effet de levier, ce qui signifie que les investisseurs empruntent des fonds pour accroître leur position. Cela peut amplifier les gains, mais aussi les pertes. Dans l’ensemble, ces transactions représentent environ 800 G$ en valeur de marché et remplissent une fonction essentielle en assurant la liquidité sur le marché. Si de nombreux investisseurs liquidaient simultanément leurs positions à effet de levier, cela pourrait entraîner un choc de liquidité soudain et potentiellement sévère, comme nous l’avons vu lors de la pandémie de COVID-19. D’autres opérations d’arbitrage à fort effet de levier, impliquant des émissions antérieures ou des écarts de swaps, ont également été identifiées comme des facteurs susceptibles de contribuer à la crise de liquidité.
En plus de son double mandat (le plein emploi et la stabilité des prix), la Réserve fédérale cherche également à garantir la stabilité des marchés. Nous pensons que la Fed interviendra rapidement si elle estime que le marché est dysfonctionnel ou si un problème survient dans le processus d’intermédiation. Susan Collins, présidente de la Banque fédérale de réserve de Boston, a confirmé cette position le vendredi 11 avril, déclarant au Financial Times que la banque centrale serait « absolument prête à répondre à toute préoccupation concernant le fonctionnement des marchés ou la liquidité, si cela devait se produire ».
Des mesures de politique monétaire générales telles que des baisses de taux ou un assouplissement quantitatif semblent peu probables dans le contexte actuel. Les tarifs douaniers placent la Fed dans une position délicate. Ils ont le choix entre maintenir une politique visant à lutter contre l’inflation et risquer une récession, ou assouplir la politique et risquer que l’inflation ne devienne incontrôlable. Nous anticipons que la Fed mettra l’accent sur la lutte contre l’inflation, car le chômage ne constitue pas une préoccupation majeure à ce stade, et nous pensons qu’elle ne souhaite pas être perçue comme servant les intérêts de l’administration Trump. Mais la banque centrale dispose d’autres moyens pour stabiliser les marchés, qui se sont révélés très efficaces par le passé. En voici quelques exemples :
Ce type de programme peut être mis en œuvre rapidement. Parmi les autres mesures possibles figurent l’accélération de la fin du resserrement quantitatif ou un assouplissement de la réglementation afin de permettre aux banques de détenir davantage de titres dans leur bilan. Le Trésor dispose également d’un important pouvoir de contrôle sur le processus de gestion de la dette. Nous prévoyons toujours le statu quo pour les adjudications d’obligations cette année, mais il est possible de modifier la composition de l’offre pour soutenir certaines parties de la courbe.
Cependant, ce type de mesures ne peut pas répondre à la préoccupation persistante : une intervention politique excessive pourrait avoir réduit la demande structurelle pour les titres du Trésor (à l’instar de ce qui s’est produit au Royaume-Uni lorsque l’ancienne Première ministre Liz Truss a annoncé un mini-budget prévoyant de colossales réductions d’impôts en 2022). Si cela se confirme, il est peu probable que la Fed soit en mesure d’y remédier sur le long terme.
L’élan économique devrait s’atténuer, dans la mesure où les tarifs douaniers constituent un risque important pour les dépenses de consommation, qui représentent près de 70 % du PIB américain. Ils réduisent le pouvoir d’achat en raison de leurs effets inflationnistes, ce qui pourrait freiner la demande de biens et de services. Même si les tarifs douaniers ne sont pas entièrement répercutés sur les consommateurs ou s’ils sont négociés à la baisse par rapport à leurs niveaux initiaux, leur incidence économique plus large pourrait accentuer les risques de baisse, notamment en cas de mesures de rétorsion entraînant une baisse des exportations.
Ainsi, les risques de récession semblent augmenter, même si les pressions inflationnistes continuent probablement de s’intensifier. Nos gestionnaires de portefeuille de titres à revenu fixe ont généralement adopté une position défensive, en fonction de leurs occasions d’investissement respectives, en privilégiant des titres de crédit de meilleure qualité et des positions sur les taux conçues pour préserver les portefeuilles dans un contexte d’aversion au risque. Au sein de l’équipe chargée des taux, nous estimons que les inquiétudes du marché concernant la position de valeur refuge des États-Unis sont probablement exagérées. La duration nous semble désormais plus attrayante, compte tenu de l’augmentation des risques de baisse. Les rendements américains ont augmenté malgré une trajectoire de croissance préoccupante et semblent attrayants sur une base corrigée en fonction de l’inflation par rapport aux autres marchés développés.
Les stratégies misant sur l’accentuation de la courbe ont profité de la hausse de la prime de terme et servent de couverture contre la récession. Il est important de noter que la courbe des taux pourrait s’accentuer dans plusieurs scénarios : 1) la Fed procède à des baisses de taux en réponse à un choc de croissance, même en présence de pressions inflationnistes élevées, ou 2) des préoccupations liées à un déficit accru et à l’offre de titres du Trésor (en particulier si des mesures budgétaires anticycliques sont déclenchées) font grimper les rendements à long terme, même si la Fed ne réduit pas ses taux.
Thomas Reithinger est gestionnaire de portefeuille pour le Fonds Capital Group revenu fixe essentiel plus canadien (Canada) et le Fonds Capital Group obligations mondiales (Canada).
Duration : une mesure de la sensibilité d’une obligation aux variations des taux d’intérêt. En règle générale, le prix d’une obligation augmentera de 1 % pour chaque année de duration si les taux d’intérêt baissent de 1 %, ou diminuera de 1 % pour chaque année de duration si les taux d’intérêt augmentent de 1 %.
Courbe des taux : il s’agit de la différence entre les rendements des obligations (taux d’intérêt) de qualité équivalente, mais ayant des dates d’échéance différentes.
Stratégie misant sur l’accentuation de la courbe : positionnement de portefeuille conçu pour générer des gains lorsque l’écart entre les rendements à court terme et à long terme s’accentue.
Prime de terme : compensation exigée par les investisseurs pour supporter les risques de variation des taux d’intérêt.
Émissions antérieures : se réfère aux obligations du Trésor américain qui ne sont pas les plus récemment émis. Certaines transactions d’arbitrage cherchent à exploiter les écarts de prix entre ces titres et les émissions les plus récentes du Trésor.
Écarts de swap : il s’agit de la différence entre le rendement d’un contrat de swap et le rendement d’une obligation d’État de même échéance.
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